Monsieur le ministre,
Depuis des mois, les personnels exercent dans des conditions extrêmement dégradées. Ils subissent les ordres et contrordres permanents engendrés par les protocoles successifs. La mise en place du protocole du 29 novembre qui prévoit que les élèves doivent se faire tester immédiatement dès l’annonce du contact avec un cas positif accentue encore le chaos dans les écoles.
Le SNUDI-FO, avec sa fédération la FNEC FP-FO, a toujours indiqué que, si les tests pouvaient être un moyen d’éviter les fermetures massives des classes et des écoles, ces campagnes de « testing » devaient relever des autorités sanitaires compétentes, agences régionales de santé en particulier. Or, ce que vous proposez actuellement à travers le nouveau protocole et la FAQ, c’est que ce soient les personnels de l’Education nationale, directeurs et enseignants en première ligne, qui effectuent ces tâches de contrôle qui ne relèvent pas de leur statut.
De plus, les personnels sont confrontés à d’importants problèmes de sécurité (arrivées incessantes d’élèves et de parents alors que les injonctions hiérarchiques en matière d’intrusion sont toujours aussi pressantes, parents qui refusent ou ne peuvent effectuer les tests, parents qui laissent les élèves à l’entrée des écoles car ils doivent aller travailler…). Aucune réponse n’est apportée aux personnels qui se retrouvent seuls. Devraient-ils par exemple prendre la responsabilité de renvoyer chez lui un élève qui ne peut produire de test négatif ?
Les collègues sont à bout et se saisissent des registres de santé et sécurité au travail pour tirer la sonnette d’alarme. Ils indiquent par exemple :
« Depuis plusieurs mois, notre charge de travail ne cesse d’augmenter. Nous faisons dans nos écoles des efforts d’adaptation à des protocoles exigeants et changeants. »
« Je dois gérer la vérification des tests pour le retour au compte-goutte des élèves. »
« Je dois éditer des courriers nominatifs pour les familles et informer la cellule covid. »
« Je dois gérer les parents mécontents quand on leur annonce la fermeture immédiate de la classe de leur enfant qui veulent dans la minute (car ils en ont besoin) le courrier nominatif pour leur employeur. »
« Ce rythme effréné n’est pas tenable. »
Monsieur le ministre, il est de votre responsabilité statutaire d’employeur de l’entendre et de garantir aux agents des conditions de travail de nature à préserver leur santé tant physique que mentale.
En particulier, le SNUDI-FO vous rappelle avec sa fédération que le télé-enseignement n’existe pas et que le télétravail à distance n’est pas statutaire et ne peut être obligatoire. Or, la dernière version de la FAQ indique « En l’absence de présentation d’un test, la suspension de l’accueil en présentiel est maintenue pour la durée de 7 jours, pendant laquelle les élèves concernés bénéficient de l’apprentissage à distance. » et nous constatons que les pressions se multiplient dans les départements pour que les personnels cumulent travail en présentiel et en distanciel. Le SNUDI-FO ne peut l’accepter.
Il est également de votre responsabilité de recruter les personnels nécessaires pour pourvoir au remplacement des enseignants absents. La situation devient intenable partout. Le non-remplacement est désormais la norme et touche souvent plusieurs classes au sein d’une même école. Dans certains départements, les mairies mettent en place le service minimum d’accueil normalement prévu en période de grève ; ailleurs des IA-DASEN sont contraints de faire appel à des retraités pour assurer des remplacements ! Cette école n’est plus l’Ecole.
Et c’est dans ce contexte d’extrême tension, alors que les personnels sont à bout, que vous décidez de maintenir les dispositifs tels que les évaluations d’école ou les formations « constellations » qui se généralisent.
Dans les départements, des collègues « constellés » sont remplacés alors que le nombre de classes fermées par manque de remplaçants explose.
Monsieur le ministre, cette situation n’est plus tenable. Le SNUDI-FO vous demande donc :
Le respect du statut des professeurs des écoles et du décret de 1989 qui définit les prérogatives des directeurs ; en particulier, les directeurs ou les enseignants n’ont pas à contrôler les tests des élèves. Des personnels adaptés et compétents doivent être mobilisés à cet effet en lien avec les ARS. Le SNUDI-FO refuse que la responsabilité du directeur ou de l’enseignant soit engagée alors que ces missions relèvent de la santé publique ;
–> Le recrutement immédiat d’enseignants fonctionnaires, et notamment les candidats aux concours inscrits sur les listes complémentaires et l’abondement de celles-ci, de manière à assurer le remplacement des enseignants absents et à alléger les effectifs ;
–> Le recrutement immédiat d’AESH, d’infirmières, de médecins scolaires, de médecins de prévention, de PsyEN… ainsi que la réintégration de tous les personnels suspendus car non vaccinés, pour faire face à la situation ;
–> L’arrêt des pressions envers les personnels pour qu’ils effectuent du télé-enseignement qui, contrairement à ce qu’affirme la FAQ, ne repose sur aucune obligation réglementaire ;
–> L’abandon immédiat des évaluations d’école, des formations en constellations et de toutes les contre-réformes qui sont rejetées par les personnels (mesures statutaires du « Grenelle », loi Rilhac, expérimentation à Marseille…) ;
–> Le respect de l’obligation statutaire de l’employeur de protection des agents (véritable suivi médical des agents ce qui suppose le recrutement de médecins de préventions, mise en oeuvre de la protection fonctionnelle …).
Monsieur le ministre, à l’instar des personnels hospitaliers qui manifestent et ont encore manifesté massivement le 4 décembre dernier contre les fermetures de lits et d’hôpitaux alors que le gouvernement, en pleine pandémie, a supprimé 5778 lits en 2020, les personnels de l’Education nationale sont à bout.
Ils ne supportent plus le chaos dans les écoles, les protocoles inapplicables, les injonctions, la pression… Ils veulent pouvoir enseigner. Cela ne peut passer que par la satisfaction des revendications, en y mettant les moyens nécessaires.
Le SNUDI-FO, avec sa fédération la FNEC FP-FO, prendra pour sa part toutes ses responsabilités. Un préavis de grève a été déposé jusqu’aux vacances de Noël.
Veuillez recevoir, Monsieur le ministre, l’expression de mes salutations distinguées.
Frédéric Volle, secrétaire général du SNUDI-FO